Jacques Réda

Two Views of Bercy
December 14, 2015 Reda Jacques

Two Views of Bercy

 

I

It seems that the sun has stopped and will move no more

a haymaker at rest in the gray field beneath the towers

her pink face shining through the branches over the roofs of Bercy

Roving between the river and the blond door of the church

I am the shapeshifting demon of stasis

The soft sands mark the phases of the lowering surge

with eyelids that rest on the water as it falls back to sleep

And here I see a shy servant of the light

her profile bent in the mauve shadows of the moss-grown barn

her hands in her apron folds because the work is done

and in the happy silence of her head the last words have been said

I call out to an orange cat that has sat down demurely

and is staying for a few moments just to be polite

I feel he is discerning but that circumstances trouble him

He shrinks into his fur blinking his eyes like a monk

Then a magpie flies up from the bridge of the customs house

and a sleek train murmurs between the rails and the road

like the sleeping body of time as it turns in a dream

dreaming that it hears itself sleep in the silence of Paris

where as I lift it the lid of a letter box squeaks

II

When did anyone last use the slim stone bench tucked away

in a crook of the balustrade on the Tolbiac bridge

In those days bridge builders had the manners or the grace

to think of children and lovers and the occasional loafer

happily admiring the drifts of sand below on the quay

by the still river spangled with impressionist gleams

A lane of gleditsias leads to the railroad bridge

On one side hang chambers of the sort found at the baths

on the other a sign for the Saint-Marc laundry THAT CLEANS ALL

You also see benches in cast iron and wood under the trees

and tufts of grass growing lush and wild as though near a well

And yet you never meet anyone much in these places—

even the bums prefer somewhere a bit less austere

Evening hangs around sunken in such a haze of rose pink

that it turns the slabs crushing the Gare de Lyon into Sèvres plates

and on the riverbank all the plane trees of Bercy droop with love

And still a breath of wind plays among the bridge columns

with its hands in the nets of blond hair floating as though at the prow

of a barge baptized “Paulhan”—all that laundry and the flag

black with a white death head and the two pirate bones crossed

 

 

Deux vues de Bercy

I

Il est evident que le soleil s’arrête et ne bougera plus.

Comme au fond de champs gris sous les tours se reposerait une faneuse,

sa face rose à travers les branches luit sur les toits de Bercy.

Je tourne entre le milieu du fleuve et le parvis blond de l’église,

je suis comme le démon variable de l’immobilité.

Là des sables adoucis marquent des étapes de la décrue,

paupières superposées vers le retour au sommeil de l’eau;

ici j’aperçois une timide servante de la lumière:

dans un recoin mauve de grange plein de mousse elle se penche de profil,

les mains au creux du tablier parce que l’ouvrage est faite,

et que dans le silence heureux de sa tête les derniers mots sont dits.

J’ai appelé un chat roux qui s’est assis par politesse,

que n’attend qu’un délai convenable pour pouvoir repartir.

Je le sens compréhensif mais la circonstance l’embarrasse;

il s’enfonce dans son poil et cligne bien chanoinement des yeux.

Alors une pie s’envole et, du pont de la gare de la douane,

roule le grondement d’un train moelleux, entre le fer et le pavé,

comme le corps assoupi du temps quand il se retourne en rêve,

et rêvant qu’il s’entend dormir dans le silence de Paris,

où je fais grincer ce petit volet aux boîtes du bureau de poste).

II

Depuis quand n’a-t-on pas utilisé l’etroit banc de pierre

ménagé dans un retrait de la balustrade, au pont de Tolbiac?

Les constructeurs avaient de ces principes ou prévenances, naguère,

pour les enfants, les amoureux, les flâneurs assez rares

qui se contentent d’apprécier les tas de sable en bas sur le quai

du fleuve immobile tout pailleté de reflets impressionistes.

Une allée de gleditschias conduit jusqu’au pont du chemin de fer.

La surplombent d’un côté des donjons de style station thermale,

et de l’autre un avis de la lessive Saint-Marc qui nettoie tout.

On voit aussi des bancs mais en fonte et bois sous les arbres

dont la base se fourre de touffes d’herbe, folle comme autour d’un puits.

Mais on ne rencontre jamais grand monde non plus par ces parages;

même les clochards préfèrent des lieux d’une moindre austérité.

Seul le soir s’y prélasse, plongé dans une telle buée rose,

qu’elle rend en pâte de Sèvres les cubes qui broient la gare de Lyon

et que tous les platanes de Bercy croulent d’amour sur la rive.

Pourtant un peu de vent fait jouer, entre les piles du pont,

des mains dans des mailles de cheveux blonds qui flottent, comme à la proue

d’un chaland baptisé Paulhan, tout ce linge et le pavillon

noir à tête de mort blanche et deux os en X des pirates.

Jacques Réda was born in 1929, was awarded the French Academy’s Grand Prix in 1993 for a lifetime’s work. In 1978 he became a member of Gallimard’s reading panel; he was editor of the Nouvelle Revue Française from 1987 to 1995. His prose work The Ruins of Paris appeared in translation by Mark Treharne in 1996. He received the Bourse Goncourt de la Poésie in 1999.